Reconnaissance du soldat
Un texte de Patrice Franceschi, écrivain
Il n’est pas de reconnaissance véritable sans éloge préalable – du moins pour ce qui importe en ce bas-monde et transcende le réel. Dans le domaine des activités humaines, peu de métiers permettent cette transcendance car il faut qu’ils contiennent dans leur être-même une élévation d’âme peu commune. C’est chose fort rare. Au coeur des sociétés démocratiques comme la France, un métier peut parvenir à cette élévation : celui de soldat.
Mais, en vérité, s’il est compris comme il doit l’être, ce métier n’en est plus un. Il est une vocation. Voilà le seul terme qui convienne au soldat de France puisque le lien qu’il entretient avec sa fonction contient un idéal tenant en peu de mots : défendre les siens quel qu’en soit le prix. Il se sent au service de quelque chose de plus grand que lui et, dès lors, consent à donner la mort comme à la recevoir. Ce consentement ne se trouve dans aucune autre profession et fait du soldat une exception au sein de sa société. Avant tout apprentissage des armes, c’est ce sens profond de son existence que ses chefs doivent cultiver.
Cette figure du soldat est souvent mal comprise bien qu’il soit le seul lien entre la nation et son armée, le seul moyen de renforcer l’esprit de défense au moment où les orages de l’histoire se rapprochent. Il se sent parfois étranger dans son propre pays. Les valeurs qu’il porte ne sont plus communes aux civils qu’il côtoie. Il demeure pourtant, et quoi qu’il arrive, le rempart de ceux qui ne le comprennent pas. Et cette abnégation, s’il se refuse à n’être qu’un soldat-technicien, fait sa grandeur.